lundi 11 mai 2015

Grandes manoeuvres autour de Here, le leader mondial de la cartographie

Si l'on en croit le Wall Street Journal, Nokia serait tenté de vendre Here, sa division sur la cartographie et les services de géolocalisation. C'est pourtant la seule pépite qui reste à l'ancien leader mondial de la téléphonie, mais il a bien le droit de se tromper une fois de plus. Façonné à partir du savoir-faire de Navteq dans les cartes numériques et de l'expertise de Nokia dans les mobiles, ce pôle a surtout une position bien établie dans le secteur de l'automobile. Here équipe avec ses cartes 80 % des véhicules vendus avec des systèmes de navigation, ce qui représente 13 millions d'unités pour les USA et l'Europe. De quoi susciter la convoitise.
Dans plusieurs articles, le WSJ passe en revue un certain nombre d'hypothèses. La plus logique serait que Microsoft fasse une offre. L'éditeur de logiciels, qui a déjà racheté à Nokia son activité de téléphones mobiles, pourrait ainsi rester dans la course à la voiture connectée (alors qu'il se trouve en dehors du match entre Apple et Google pour l'intégration des OS).

L'hypothèse la plus crédible est celle d'une alliance entre les trois ténors du haut de gamme allemand, Audi, BMW et Mercedes. Avec l'aide de Baidu*, ils pourraient ainsi se protéger contre l'hégémonie de Google, qu'ils veulent bien accueillir au sein de leurs écrans embarqués, mais pas trop. Et puis, historiquement, l'Europe a aidé Navteq (autrefois Navigation Technologies, dont l'actionnaire de référence a longtemps été Philips) à se développer dans l'automobile, en particulier BMW. Here répond aux contraintes de qualité de l'industrie automobile et a entamé une migration vers le cloud pour les services connectés et vers la conduite autonome.

Plus étonnant, Uber serait prêt à s'offrir Here. Le service de voitures avec chauffeur veut s'émanciper de Google (qui est pourtant un de ses actionnaires) au niveau de ses cartes. La société s'est offerte l'éditeur de logiciels DeCarta et a conclu un partenariat avec l'Université de Carnegie Mellon pour développer la voiture autonome. Uber a toujours dit qu'il voulait se passer de conducteurs. Le lien avec la cartographie est donc assez évident.

On évoque aussi parmi les acheteurs potentiels Apple (qui a développé son propre logiciel de cartographie, peu efficace au début mais nettement plus performant aujourd'hui) et Facebook (on se demande ce qu'il pourrait en faire, bien qu'il y ait un contrat avec Here).

Le fait est que les constructeurs allemands auraient menacé de ne plus acheter de cartes Here si un acteur américain de la Silicon Valley mettait la main sur la technologie et le savoir-faire de ce fournisseur. Auquel cas ils pourraient se rabattre sur TomTom (propriétaire des cartes de Tele Atlas), qui travaille aussi sur la voiture autonome.

*Audi semble être sur le point de passer un accord avec le Google chinois.